Insula_5
L’ Insula V située au nord de l'Insula IV à travers le Decumanus Inferieur, s'étendait aussi sur le Decumanus Maximus où elle fait face au Forum de la Cité. Il est lié à l' occident et l'orient respectivement par les Cardines 4 et 5. Cette insula se caractérise par les Maisons Samnite , du Grand portail, de l'Atrium Corinthien, du Bicentenaire, de la Belle cour, de la Mosaïque de Neptune et enfin la Maison du Meuble carbonisées. D’ autres demeures font également partie de l’ insula la Maison du Sacellum en bois, la Maison du Tailleur et un nombre important de habitations avec boutiques et thermopolium encore sans nom ; le manque de informations certes à l'heure actuelle, ne permet pas un catalogage sur ces dernières.
Maison Samnite (Insula V, n. 1-2). - Bordée d'un trottoir dont le pavement est particulièrement soigné, elle possède une entrée flanquée de deux podiums et constituée par un beau portail, dont les pieds-droits en opus quadratum sont surmontés de chapiteaux corinthiens en tuf. Malgré les remaniements et les destructions qu'elle a subies, cette maison, plus qu'aucune autre, met en évidence la structure et l'architecture de l'habitation de type samnite à Herculanum. La galerie en saillie, au-dessus du portail et sur toute la longueur de la façade, est due, comme c'est le cas pour la " Maison à la cloison de bois „ voisine, à un agrandissement de l'étage supérieur exécuté lorsque, au moyen d'une autre entrée au n. 2 et d'un raide escalier en bois, les pièces situées au-dessus de l'entrée furent complètement détachées du reste de l'habitation pour pouvoir les louer séparément .
On pénètre dans la maison par un vestibule qui a conservé la décoration typique du Ier style à bossage avec plaques en relief de faux marbre polychrome, unique exemple de cette décoration qui ait subsisté jusqu'à présent en bon état à Herculanum.
Ce vestibule débouche dans un très bel atrium, unique également dans l'architecture des maisons particulières, avec sa gracieuse galerie à petites colonnes ioniques reliées entre elles par une balustrade à transenne revêtue de stuc très fin.
On retrouve, dans cet atrium de petite maison herculanaise, le motif architectonique des galeries des portiques hellénistiques et l'on y découvre, sous une forme embryonnaire, des formes et des structures que la Renaissance italienne utilisera, en les développant, dans les cours des palais et des villas. A l'état actuel, seuls les entrecolonnements du côté Est sont ouverts, de manière à donner le plus d'air et de lumière possible à tout l'atrium. Mais, à l'origine, c'est-à-dire avant que les pièces en façace du premier étage aient été séparées pour les louer, il est probable que des fenêtres devaient également s'ouvrir sur le côtés Ouest et Nord.
Cette maison, dépourvue du jardin qu'elle devait certainement posséder à l'origine, ne dispose, au rez-de-chaussée, que de quelques pièces mais toutes décorées avec raffinement: un cubiculum (à droite du vestibule) orné de peintures délicates sur fond uni vert-d'eau avec un petit panneau central représentant l'Enlèvement d'Europe et quelques légers traits d'ombre archi-tectoniques; une plus grande salle (à gauche) dont les murs portent des graffiti grossièrement tracés sur le fond rouge; au fond, le tablinum, transformé en salle avec un beau pavement en opus signinum et tessellatum, communique avec une autre pièce, elle aussi finement décorée.
Un escalier intérieur menait aux pièces de l'aile méridionale de l'étage à galerie. Parmi les objets récupérés durant les fouilles et exposés dans l'atrium, figurent: une statuette (mutilée) de Vénus chaussant une sandale, quelques fragments de pieds de table en bois sculptés en forme de chiens courants. Parmi les denrées comestibles, des petits pains de pâtisserie emplissant une assiette.
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
Maison au Métier à Tisser (Insulta V, n. 3-4). - Contrastant entièrement avec l'élégante maison samnite, qu'elle suit immédiatement, cette maison devait servir à la fois de logement et d'atelier à des artisans, probable ment des fabricants et des vendeurs de tissus (textores). L'entrée (n. 4) mène par un long couloir aux pièces d'habitation en grande partie rustiques du rez-de-chaussée et à la petite cour intérieure entourée d'un petit portique à colonnes en briques. Le long d'un des côtés de ce portique, on a trouvé quelques morceaux de bois carbonisés et des poids ayant appartenu à un métier à tisser. L'entrée située après (n. 3) donne accès à l'atelier proprement dit, qui devait servir aussi de dépôt et de magasin de vente. Toute la partie antérieure de la maison était couverte par une seule grande toiture qui débordait largement au-dessus du trottoir. Le grand local, situé à gauche de l'entrée, prenait l'air, à l'origine, par toute une série de fentes courant sous la toiture, qui ont été ensuite bouchées.
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
Maison au Mobilier Carbonisé (Insula V, n. 5). - Elle appartient, comme la " Maison au squelette,,, celle "à l'Hermès de bronze „ et celle " à l'Atrium corinthien,,, à ce type d'habitations, petites mais élégantes (parva sed apta), appréciées par la classe moyenne d'Herculanum. Sans rechercher les gains du grand commerce ou l'opulence tapageuse des propriétaires de magasins, cette classe réussissait à défendre l'intégrité de la vieille maison patriarcale contre l'avidité effrontée des riches et surtout des " nouveaux riches „ envahissants.
Plusieurs éléments indiquent qu'il s'agit d'une maison appartenant, par son plan et par son mode de construction, à l'époque préromaine: les dimensions encore grandes du portail, à l'extérieur; la hauteur du vestibule d'entrée; le schéma archi-tectonique du petit atrium reproduisant, en réduction, la disposition de la galerie supérieure, ouverte d'un côté et fermée sur les trois autres côtés, de la même manière harmonieuse et puissante que l'atrium de la " Maison samnite „ voisine; enfin, la distribution générale des pièces autour de l'atrium et de la petite cour postérieure, suivant la tradition. La décoration des murs, à l'intérieur de la maison, a été refaite, en une seule fois, à l'époque flavienne. Sans présenter un intérêt artistique particulier, elle donne une note de fraîcheur et d'intense gaieté à l'intérieur.
Au fond du vestibule d'entrée, la vue du beau petit temple peint sur le mur de fond de la cour est d'un agréable effet, fruit d'une trouvaille du propriétaire. A droite du vestibule, la pièce principale, le tridinium, déploie sa belle décoration fastueuse de IVème style et son pavement en marbres polychromes à encadrement. Dans les petits panneaux des murs: jeune coq ramassé sur lui-même, le bec ouvert, devant un petit tas de cerises et, à côté, nature morte avec des champignons , des dattes, des figues , des noix . A gauche du vestibule: alcôve avec antichambre, ne formant à l'origine qu'une seule pièce, comme l'indique clairement le dessin du pavement, la mince cloison ayant été ajoutée par la suite.
Au fond de l'atrium, élégant petit tablinum, dont les aedi-cules des murs sont peuplés de figures de femmes en train de voler ou de flotter sur l'eau, et une chambre pour la sieste et le travail (diaeta), avec une grande fenêtre sur la cour et, au mur, un petit panneau représentant le dieu Pan en train de soulever le voile d'une Nymphe endormie.Une belle pièce intérieure, plus intime, donne, par trois fenêtres formant triforium, sur la petite cour. Le lit tricliniaire adossé au mur, à la manière d'un divan, a les côtés et le dossier en bois ouvragé selon la technique raffinée du placage. Sur un des côtés, une petite mensa ou table en bois et des objets de vaisselle en verre et en terre cuite.
La petite cour, entièrement entourée par un parapet, possède un pavement en signinum avec une plate-bande circulaire au centre et d'autres trous pour faire pousser des plantes décoratives. Elle était surtout destinée à recueillir les eaux de pluie et à les canaliser vers la citerne. Le beau Laraire, décoré de stucs et de peintures, dont elle est ornée, les larges fenêtres qui découpent ses murs, les plantes et les buissons qui y prospèrent encore, confèrent à cette simple cour une grâce indicible imprégnée d'atmosphère de vie familiale intime et sereine.
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
Maison à la Mosaïque de Neptune et d'Amphitrite (In-sula V, n. 6-7). - Par suite soit du tremblement de terre qui a accompagné la terrible éruption, soit de la violence de l'irruption du fleuve de boue, le mur de façade de la galerie supérieure s'est abattu, nous offrant, de la rue, le spectacle d'un intérieur dont l'intimité est brusquement dévoilée. En bas, une grande boutique, à côté de la porte d'entrée. En haut, les pièces d'habitation donnant sur la rue avec les murs de séparation encore bien décorés. On remarque un cubiculum, dans lequel sont conservés un lit à cadre de bois, un candélabre et une trapeza de marbre.
La boutique, comparée à celles que, par centaines, Pompéi nous a restituées, est mieux conservée, à un point qui semble tenir du miracle. C'est aussi la mieux aménagée de toutes celles qui ont été découvertes. Sur le grand comptoir, à l'entrée, sont disposées les ustensiles et la marchandise qui ont servi jusqu'au dernier moment de la vente. A l'intérieur, sur une sorte d'étagère et sur le rebord d'une soupente, sont encore alignées les amphores qui servaient à débiter le vin. Derrière le comptoir, une sorte de transenne à grillage de bois serré, comme on en voit dans les couvents. Dans les angles, le fourneau et l'évier.
Nous ne savons pas qui était le propriétaire de cette boutique si bien achalandée. Mais, à en juger par le confort régnant à l'intérieur de la maison, par la majesté de {'atrium, par la richesse de certaines pièces, par certains petits bronzes et panneaux de marbres peints (oeuvres d'artistes néo-attiques), qui ont été retrouvés près du Laraire, on est porté à croire que le goût et le raffinement intellectuel de cet Herculanais inconnu devaient être comparables à ceux de ces marchands opulents de la Renaissance qui, après avoir débité en abondance de la laine dans leurs magasins, aimaient à se réfugier dans une belle maison décorée d'oeuvres d'art.
La petite cour intérieure, qui frappe l'oeil par la vivacité des couleurs du revêtement de mosaïque de ses murs, est particulièrement remarquable. Il semble que l'heureux propriétaire de cette maison ait voulu compenser par un luxe éblouissant de grand patricien l'absence de portique et de jardin largement ouvert sur la mer et le ciel. La table du triclinium en plein air n'est que légèrement surélevée au-dessus du pavement; tout autour, les murs font scintiller leurs mosaïques. Celui du fond est formé d'une nymphée à niche centrale en forme d'abside et flanquée de deux niches plus petites rectangulaires. La façade de cette nymphée est entièrement revêtue de mosaïque en pâte vitreuse, admirablement conservée. Sur les montants des niches grimpent de longues branches de vigne portées par des can-thares.
En haut, sur champ d'azur et sous de riches festons de feuilles et de fruits, se déroule une scène de chasse, avec des chiens poursuivant des cerfs. Des coquillages et des éléments de madrépores décorent les bords et le fond des niches, comme on aura coutume de le faire pour les fontaines des villas et des jardins du Quattrocento et du Cinquecento. Enfin, des masques de théâtre et une superbe tête silénique, portant encore des traces vives de polychromie, surmontent, à la façon d'acrotères, le faîte de la nymphée et, plus haut, le mur de fond de la petite cour. A côté, sur l'autre mur, face à l'entrée de la maison et sous un aedicule couronné d'une coquille, un grand panneau de mosaïque traite le motif mythique de Neptune et Amphitrite.
Sa décoration de plantes et d'animaux, sa technique audacieuse-ment impressionniste font de cette mosaïque d'Herculanum un des témoignages les plus éloquents de la continuité de l'art de la mosaïque rurale, depuis l'antiquité alexandrine et romaine jusqu'à l'ère chrétienne et byzantine.
Dans la pièce précédant la petite cour de la nymphée, sous une vitrine, est conservé un gracieux petit hermès en bronze, représentant Hercule. Dans l'atrium, on a retrouvé une belle statuette de Jupiter .
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
Maison à la belle cour (Insula V, n. 8). - C'est une petite maison offrant un intérêt particulier en raison de l'originalité de son plan. Au lieu de l'entrée habituelle avec le vestibule, on trouve une vaste pièce basse rectangulaire, qui donne accès à d'autres pièces en partie rustiques (à droite), en partie décorées (à gauche). Parmi ces dernières, on note une petite cuisine et une salle triclinaire donnant sur la cour. La petite cour surélevée n'a pas d'impluvium mais son élégant pavement de mosaïque est suffisamment en pente pour permettre aux eaux de pluie de s'écouler dans une citerne par une rigole.
Un élégant escalier s'y déploie, comme dans la cour des maisons italiennes du Trecento ou du Quattrocento. De simples motifs de peinture ornementale égayent la balustrade et la galerie de cet escalier, au dessous duquel s'ouvre la bouche de la citerne. Le motif de la vigne à l'abondant feuillage, peint sur le mur, crée une atmosphère légère de pergola. A l'étage supérieur, quelques pièces font saillie au-dessus de la rue au moyen de l'habituelle galerie de bois. Le salon qui s'ouvre à rez-de-chaussée, au Sud de la petite cour, est la seule pièce qui ait été conservée d'une plus grande maison construite avant le tremblement de terre de l'an 62 ap. J. C. et qui communiquait avec la " Maison du Bicentenaire „
Le cardo se prolonge, profondément encaissé entre deux hauts trottoirs. Au croisement avec le decumanus, se dresse une borne-fontaine (tronquée à un tiers de sa hauteur), portant des inscriptions peintes, dont l'une contient des règlements de la police de la route édictés vraisemblablement par les édiles. Sur le côté, un autel compital (dédié aux lares protecteurs des carrefours) flanqué de serpents agathodémoniens. En face, reposant en partie sur le trottoir du decumanus, une fontaine publique à deux jets d'eau. Elle porte, sur un côté, l'emblème en relief grossier de Vénus au bain et, sur l'autre, un masque de Gorgone.
Nous sommes ainsi arrivés au grand decumanus :
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
Boutique (Insula V, n. 10, avec une entrée secondaire sur le cardo, n. 9). - On remarque les jarres à demi enterrées sous le pavement de la boutique (dolia defossa) et dont certaines, munies de couvercles, étaient destinées à conserver, à la manière de petits silos, des céréales et des légumes secs. Au-dessus du petit portique du trottoir du côté Ouest, la galerie en saillie de l'étage supérieur était utilisée comme dépôt de blé (il en restait encore une assez grande quantité). Cette boutique faisait partie de la maison qui suit (n. 11-12), comme le prouve clairement une petite porte de communication.
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
Maison (Insula V, n. 11-12). - C'était une maison noble, plus vaste à l'origine, ayant été réunie à la " Maison du Bicentenaire ,, voisine au moyen de pièces de communication, qui ont été murées ensuite. Dans les murs de l'atrium, on remarque les trous des grandes poutres maîtresses qui soutenaient la charpente du toit à compluvium. Certains réaménagements intérieurs prouvent, par leur pauvreté, que la maison prenait, au cours des dernières années, le caractère d'un véritable immeuble de rapport. Le tablinum a, cependant, conservé son élégance avec son pavement en opus sectile de marbre (assez semblable à celui du tablinum de la " Maison du Bicentenaire „) et avec ses murs décorés de grands panneaux à fond jaune. Sur le mur du fond, on voit encore un petit tableau avec Apollon citharède, portant une couronne de laurier, en compagnie d'une Nymphe, tandis qu'un Erôs, sur le côté, porte le lourd carquois du dieu. La pièce n. 12 était aussi aménagée en boutique. Une simple étagère de bois à compartiments horizontaux y est encore adossée au mur.
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
Boutique avec logement (Insula V, n. 13-14). - Indépendante aujourd'hui, elle faisait partie à l'origine de la " Maison du Bicentenaire La boutique, qui n'a ni comptoir de vente ni meuble à amphores pour les denrées alimentaires, se rapproche plutôt du genre de boutique d'artisan. Un pauvre cloisonnement la sépare de la cage de l'escalier montant au logement situé aud-dessus
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
Maison du Bicentenaire (Insula V, n. 15 et 16). - Ains appelée parce que l'on a achevé de la désensevelir en 1938, année de la commémoration du deuxième centenaire des premières fouilles d'Herculanum (1738). Située en bordure du " decumanus maximus ", au milieu de boutiques et d'humbles habitations, c'est la plus noble et la plus somptueuse maison de l'insula V. Cependant, elle a subi les mêmes humbles transformations que l'on a remarquées dans les autres édifices privés. Le rez-de-chaussée a conservé intégralement le plan qu'il était de tradition d'adopter pour les maisons patriciennes.
Du couloir d'entrée, précédé du vestibule, on passe dans le vaste atrium carré, avec le toit à compluvium, dont les poutres maîtresses ont été remises à leur emplacement d'origine, avec l'agréable pavement de mosaïque à simple fond noir et à cubes blancs, avec l'impluvium de marbre bordé d'une bande de mosaïque à tresse, et les murs revêtus de beau rouge porphyre. Au fond de l'atrium, de chaque côté du tablinum, s'étendent les deux alae (ailes), celle de droite, fermée par une grille de bois pliante, devant abriter le Sacellum des Lares ou, puisqu'il s'agissait d'une famille patricienne, du sacellum pour le culte des ancêtres: imagines maiorum. Le tablinum s'enrichit d'un luxueux pavement de marbre étincelant, semblable à un tapis central multicolore, et, aux murs, de tableaux, de médaillons et de frises.
Les tableaux représentent le mythe de Dédale et Pasiphaé, d'un côté, et les amours de Vénus et de Mars, de l'autre. Dans les médaillons, des bustes de Satyre, de Silènes et de Bacchantes. En haut, une frise de petits Amours. Du tablinum, on passe au petit portique avec jardin et aux pièces rustiques du rez-de-chaussée.
Bien pauvres, en revanche, apparaissent les logements situés au-dessus du portique et qui devaient être réservés, dans les dernières années de la ville, moins à la familia des domestiques qu'à toute une série de locataires, en général de modestes familles d'artisans ou de marchands. Le rez-de-chaussée, dépourvu de mobilier d'usage courant, a dû être alors abandonné par les anciens propriétaires.
Dans une misérable petite chambre (3m x 2m,70) de ces logements pour domestiques, on remarque, sur le mur faisant face à l'entrée, un emblème cruciforme encastré dans un panneau de stuc, emblème formé à l'origine d'une grande croix de bois (de m. 0,43 de hauteur) clouée au fond du panneau et qui, d'après les crampons de fer encore fixés de chaque côté de celui-ci, devait être protégée, en tant qu'emblème sacré, par des sortes de guichets tenus par des châssis. Au-dessous du panneau de la croix, on a trouvé, et on l'a laissée à sa place, une petite armoire basse en bois, avec un plateau de bois sur le devant en guise d'autel.
On ne peut nier la valeur, du point de vue religieux, de l'emblème cruciforme et du meuble de bois situé en dessous, conçu plus pour servir d'autel que pour être utilisé comme armoire. L'interprétation que l'on a donnée de cette découverte, au mo ment où elle a été faite, à savoir qu'il doit s'agir d'un oratoir chrétien privé, recueille aujourd'hui, malgré des polémiques et des discussions assez vives, les approbations les plus larges et les plus autorisées.
D'après la découverte herculanaise, le culte chrétien de la Croix, qui n'a été instauré officiellement que par l'édit de Constantin et dont on n'avait trouvé, jusqu'alors, de témoignages que dans quelques monuments des IIème et même siècles, serait antérieur à l'an 79 ap. J. C. Il remonterait aux premiers temps de la prédication apostolique et aurait été introduit à Hercula-num par la doctrine de Saint Paul et la communauté chrétienne de Pouzzoles. Cette humble pièce d'Herculanum conserve donc un des plus précieux témoignages de la toute première période de l'Eglise.
En revenant de l'atrium vers l'entrée, on remarque, au pri-mier étage, les nièces de l'appartement donnant sur la rue et auxquelles on accède par l'escalier partant de la pièce n. 16. Les vestiges de la décoration et le Laraire peint sur un mur prouvent que cet appartement, qui avait été détaché du reste de la maison pour le rendre indépendant, était habité, au moment de l'éruption, par le dernier locataire important. Celui-ci devait être un des derniers membres de l'ancienne famille patricienne ou, ce qui est plus probable, le procurator ou l'administrateur du propriétaire qui, après le tremblement de terre de l'an 62 ap. J. C, avait sans doute préféré aller habiter une autre maison en ville ou dans les faubourgs.
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
Boutique avec arrière-boutique et logement (Insula V, n. 17-18)- - La boutique n'a pas de comptoir de vente mais est dotée d'une petite cuisine, tandis que l'arrière-boutique est élégamment décorée et que le logement à l'étage supérieur dénote une certaine aisance L'ensemble cadre plus avec le genre de vie d'un artisan qu'avec celui d'un marchand. L'utilisation de l'espace est ingénieuse: au-dessous de l'escalier raide en bois, se trouve une armoire, au-dessus de laquelle la soupente a été aménagée en débarras. De l'arrière-boutique, en regardant en haut, on aperçoit à l'étage supérieur un Laraire en bois, à petit temple, fronton et colonnes. A côté du Laraire, dans le renfoncement du mur, on a trouvé un beau tableau (jeu de petits Amours), exécuté selon la technique assez recherchée et appliquée par certains ateliers, consistant à fixer les tableaux dans de robustes châssis de bois, pour les insérer ensuite dans la décoration des murs.
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
Boutiques (Insula V, n. 19-20). - Ce sont deux boutiques avec arrière-boutiques, qui communiquaient entre elles et don n'est rien resté de la décoration ni du mobilier, après avoir été traversées par les galeries souterraines percées lors des premières fouilles. L'une d'elles est pourvue, selon la coutume, d'une cuisine et d'une latrine.
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
Boutique d'angle avec logement (Insala V, n. 21-22). -Comme toutes les boutiques situées aux carrefours, elle nous apparaît, malgré ses graves mutilations, plus vaste et plus riche que les autres. Le comptoir y est adossé au mur. Au fond, s'ouvrent une pièce réservée à la clientèle et une petite chambre de repos pour le gérant ou le gardien. L'importance des bénéfices laissés par le commerce se note surtout à l'ampleur et à l'élégance du logement de l'étage supérieur (auquel on accède par le n. 22). Une des pièces, divisée par une cloison et servant de chambre à coucher, reçoit abondamment la lumière par une fenêtre carrée qui conserve encore une partie de ses battants de bois.
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
Maison à l'Atrium Corinthien (Insula V, n. 30). - C'est une petite maison, ne possédant que quelques pièces au rez-de-chaussée, mais qui a un certain cachet de distinction et même d'élégance. Son propriétaire appartenait à la classe moyenne aisée d'Herculanum. A l'extérieur, elle est précédée d'un petit portique qui se prolonge jusqu'au croisement du decumanus et d'un trottoir en dalles de marbre plus raffiné que les autres. A l'intérieur, après une entrée à trois marches, elle s'ouvre sur un gracieux atrium polystyle à six colonnes (trois de chaque côté), disposées autour du bassin de l'impluvium, au milieu duquel la cuvette basse d'une fontaine dessine une croix. Les fûts de tuf des colonnes sont recouverts de stuc rouge et blanc.
A droite de l'entrée, une pièce dont le pavement de mosaïque, au fin dessin géométrique, reproduit le motif de la double hache sacrée (labrys) stylisée. Dans une vitrine: trapeza de bois avec les pieds en forme de tête de griffon et une petite corbeille ronde à couvercle, en fibre végétale délicatement tressée et qui devait servir à contenir des objets personnels sans doute précieux. A gauche de l'entrée: le foyer, les latrines et un petit escalier menant à l'étage supérieur. Le long du côté Sud: élégant cubicul m rectangulaire avec plafond à trois entrevous dont deux ont été reconstitués. Au fond de l'atrium: grande salle triclinaire avec quelques vestiges seulement de la luxueuse décoration à panneaux noirs et plinthe rouge. Dans la vitrine: de la vaisselle de bronze, des strigiles, une statuette de Lare, une petite coupe pleine de pignons.
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
Maison au Sacellum en bois (Insula V, n. 31). - Appellée aussi maison de Lucius Autronius Euthyme par un sceau retrouvé, etroite et allongée, elle présente l'intérêt, malgré son humble aspect, d'avoir conservé son plan d'origine et des traces du type le plus ancien de décoration d'une petite maison de l'époque républicaine à Herculanum, type dont la " Maison à i'hermès de bronze „ nous fournit un exemple (Insula III, n. 16). En plus d'une partie du pavement en fin signinum orné d'incrustations à dessin géométrique, il reste des traces d'une noble décoration de Ier style (imitation de revêtement de marbre) sur l'architrave du tablinum, le long de la façade intérieure de l'atrium et dans quelques autres endroits. Au-dessus du tablinum, les fûts tronqués des colonnes d'une galerie supérieure évoquent la " Maison samnite ., de cette même insula (n. 1).
Derrière le tablinum, on trouve, d'un côté, une salle à manger (oecus), avec des vestiges de bonne décoration de Ier style (partie supérieure) et de IHème style (partie inférieure); de l'autre côté, un local rustique servant de dépôt, dans lequel on a retrouvé un grand nombre de couvercles de grosses jarres en terre cuite. A l'étage supérieur, dans un cubiculum, on a découvert de nombreuses tabulae ceratae (tablettes recouvertes de cire) écrites ou préparées pour l'écriture, les unes enfermées dans une cassette (capsa), les autres entassées sous le lit.
A droite de l'entrée, dans une pièce à voûte et en forme d'alcôve, dont la fenêtre est munie d'une grille, on a découvert un meuble des plus curieux: un sacellum en bois, servant à la fois d'armoire et de laraire domestique. Le sacellum a la forme d'un petit temple in antis. Ses deux colonnes corinthiennes sont finement cannelées et sculptées. La porte à deux battants, entr'ouverte, laisse voir à l'intérieur les statues des divinités. L'armoire, en dessous, conserve encore quelques objets personnels et de parure de la maîtresse de maison, qui y était attaché au point de les conserver dans sa propre chambre à coucher .
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
Maison avec Jardin (Insula V, n. 33). - C'est une humble maison avec une boutique (n. 32) donnant sur la rue. Une entrée longue et étroite, ainsi qu'un petit vestibule intérieur, servent de dégagement aux pièces disposées d'un seul côté et qui sont, en grande partie, de type rustique ou à décoration rudimentaire avec de simples motifs linéaires, dont il ne reste que quelques traces. A gauche, à l'angle du decumanus et du cardo, où l'on s'attendrait plutôt à trouver une boutique et une entreprise commerciale, s'étend un hortus qui, à l'origine, devait appartenir aux maisons plus riches, alignées derrière le mur d'enceinte, du côté de l'Ouest (" Maison au grand portail „ et " Maison samnite „).
En contournant le front de V" insula „ donnant sur le " decumanus inferior , on visite la :
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
Maison au grand Portail (Insula V, n. 35). - Ainsi appelée en raison du grand portail à demi-colonnes en briques, autrefois stuquées et peintes en rouge, surmontées de chapiteaux corinthiens à figures de Victoires ailées et d'une architrave décorée de gouttes et de mutules en brique. Ce portail, par la qualité des matériaux et par sa forme, semble annoncer déjà les portails des maisons romaines d'Ostie. Le long des murs de l'entrée, on peut voir des fûts de colonnes en tuf, provenant peut-être de la démolition de l'ancien péristyle de la Maison samnite contigue et utilisés comme matériel de construction.
L'intérieur, malgré son étroitesse et son plan assez peu respectueux de la distribution traditionnelle de la maison pompéienne, témoigne d'une aisance large et d'un goût assez raffiné. Sur l'atrium couvert, s'ouvrent les différentes pièces du rez-de-chaussée, les unes de hauteur normale et les autres à plafond surbaissé pour permettre un développement régulier de l'étage supérieur. Nous trouvons, d'abord, une petite cour découverte, qui est non pas dans l'axe mais à côté de l'entrée et dont le niveau est nettement supérieur à celui des pièces. Elle remplissait la double fonction revenant normalement à l'atrium: aérer et éclairer les différentes pièces, recueillir les eaux de pluie et les canaliser vers la citerne.
Face l'entrée, se trouve la plus noble pièce de l'appartement, à la fois salle de réception et triclinium, dont le mur de fond est orné d'un délicat petit tableau à sujet dionysiaque. Cette pièce est flanquée d'une élégante petite exèdre, dont les peintures de la frise portent de gracieux motifs de tentures, de petits Amours et d'oiseaux au milieu d'un jardin fleuri. Au bout du vestibule, un beau mur à fond noir est décoré de légers motifs architectoniques et d'un petit tableau central montrant des oiseaux en train de becqueter des papillons et des cerises. En face de la petite cour, une pièce très élégante, destinée peut-être au repos et à la sieste, avec un joli panneau en opus sectile de marbre dans le pavement et un beau motif de rideaux retombants dans la décoration des murs. Les communs (office, cuisine et latrines) sont rationnellement disposés derrière les pièces nobles du rez-de-chaussée. L'escalier menant aux quelques pièces de l'étage supérieur s'y amorce.
La boutique, qui s'ouvre sur le côté de la maison (n. 34) mais sans communiquer avec elle, était probablement louée et non pas gérée par le propriétaire.En face de la Maison au grand portail ", s'ouvrent une série de boutiques appartenant à l'insula IV .